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Un succès en trompe-l'œil

Pour Axel Dauchez, qui rappelons-le, a remplacé début janvier le co-fondateur Jonathan Benassaya à la tête de la startup, Orange est le « cheval de Troie » de Deezer et cette limitation un mal nécessaire mais bien négociée car « [il n'était] pas question, comme l’a fait Spotify, de restreindre de manière très contraignante l’accès au catalogue ».

Je vois pourtant dans ces annonces une succession de défaites pour Deezer.

D'abord, Deezer cède 11% de son capital (20% selon certaines sources) afin de sauver les meubles suite à la crise qu'à connu sa direction, qui s'est soldée par le départ d'un des fondateurs. Cet accord - qui lui permet certes d'engranger 500 000 puis 1 million d'abonnés aujourd'hui - lie dorénavant capitalistiquement la société à l'opérateur mais aussi commercialement : sans Orange, pas de croissance du nombre d'abonnés (Orange semble vendre 5 € les abonnements Premium habituellement vendus 10 €, c'est donc la guerre que se livre les FAI qui finance cette croissance). Autant dire que les 11% vont vite se muer en une majorité de fait.

Pris entre deux feux

Ensuite, face aux majors, Deezer est pris entre le marteau et l'enclume, c'est-à-dire le FAI (le grand ennemi de l'industrie du disque qui s'est développé grâce aux abonnements ADSL dopés par le téléchargement « pirate », pour reprendre un discours que l'on entend depuis 10 ans) et les majors, bien décidés à presser le citron du streaming, financé par le capital-risque pour Spotify et Orange pour Deezer (l'opérateur affiche un chiffre d'affaire dix fois supérieur à celui de la musique enregistrée... au niveau mondial !). Le feuilleton rocambolesque de la sortie prochaine de Spotify aux États-Unis, qu'on annonce imminente depuis près de deux ans, n'en est que le reflet.

Deezer est donc dans l'obligation de céder aux revendications des majors, au risque de se rendre encore plus dépendant d'Orange et de ses clients ADSL et mobiles.

Les offres de streaming qui étaient présentées comme la solution anti-piratage l'année dernière auront vite été rattrapées par l'industrie du disque, ouvrant encore un peu plus la porte à des acteurs comme Apple, Google ou Amazon dont la santé financière permettra certainement d'imposer leurs conditions...

Crédit visuel : Deezer via Clubic.com