Capture d'écran de la page d'accueil de ZeroThune - copyright Urban Musique

ZeroThune est un projet né de l'imagination de deux entrepreneurs, Yves Sassi et Philippe Macaire. Le premier a créé le site l'Observatoire de la franchise, revendu à Reed Expositions quelques années plus tard, ainsi que le Site des marques ; le second a notamment travaillé pour Yves Rocher, la franchise Physiomins ou la salle de foot indoor Festifoot.

Ce duo a ensuite été rejoint courant 2011 par Boris Berdah, créateur du site d'achat à crédit WellPack.fr.

La société derrière ZeroThune, Urban Musique, est encore en phase d'observation suite à sa mise en redressement judiciaire il y a un an de cela.

Une phase de rodage avant lancement

Le projet a connu trois phases : la première de la mi-2008 jusqu'en janvier-février 2011 (dont vous retrouvez l'historique dans ces colonnes) n'a jamais été rendue publique.

La seconde qui a débouché sur un test grandeur-nature en septembre dernier avec l'aide de la société West Interactive.

Et enfin l'ouverture au public de la troisième mouture du site www.zerothune.com, lundi 23 avril.

La musique est un droit, la musique est votre droit...

Ce lancement n'est pour l'instant qu'une phase de rodage et de correction de bugs et de lenteurs qui rendent pénible la navigation sur le site. Il n'est en effet pas encore possible de télécharger de la musique, même en la payant car c'est une nouveauté de cette troisième formule.

Comme indiqué dans un précédent billet, ZeroThune est aujourd'hui porté par la société Wellpack, spécialisée dans la vente de produits high-tech à crédit. La charte graphique du « nouveau » ZeroThune s'en ressent d'ailleurs, elle est un mélange entre l'ancienne charte graphique (disponible sur la page CrunchBase dédiée au projet ou sur Facebook) et celle du site Wellpack.fr.

Des fichiers qualifiés en échange de musique

Bien qu'il soit impossible d'utiliser pleinement le site à l'heure où ce billet est rédigé, la mécanique du site est clairement visible et exposée à travers quelques petits messages d'aide.

La formule est la suivante : remplissez des questionnaires - qualifiez-vous - répondez à des questions posées par des marques-sponsors et en échange, vous gagnerez des points (appelés thunes) que vous pourrez dépenser uniquement sur ZeroThune sous la forme de musique téléchargeable. Vos morceaux vous auront alors coûtés zéro thunes. ;-)

Les 4 étapes proposées par ZeroThune :

Mécanique de gains de thunes ZeroThune - copyright Urban Musique

Cent thunes équivalent à un morceau de musique, c'est-à-dire grosso-modo 1 €. C'est 10 fois plus que ce que rapporte par exemple l'écoute rémunérée de AlloMusic.com dont on sait aujourd'hui qu'elle n'a pas bien fonctionné.

Il existe ainsi plusieurs types de questionnaires qui seront rémunérés en thunes, selon l'aide et les textes explicatifs du site, mais au barème encore inconnu :

  • le formulaire d'inscription (à noter l'absence d'identification via Facebook ou Twitter, comme c'est maintenant d'usage afin de faciliter - et maximiser - les inscriptions) ;
  • des questionnaires « Passions » basés sur 17 thématiques, comme les voyages, la finance ou encore le sport - chacun comportant une bonne quinzaine de questions fermées à choix unique ou multiple ;
  • des questionnaires « Sponsors » (ou plutôt une récolte d'informations personnelles) poussés par les marques au moment du téléchargement.

Questionnaires thématiques - copyright Urban Musique

Chaque nouvel utilisateur serait gratifié de plusieurs titres téléchargeables après confirmation d'inscription (procédure de double opt-in bien que l'e-mail de confirmation ait été bloqué par mon filtre anti-spam), comme l'indique l'écran ci-après.

Capture d'écran de la validation d'inscription - copyright Urban Musique

Toujours d'après le site, un achat consécutif à l'envoi d'offres par e-mail sera rétribué en thunes. Une sorte de cash back mais sous forme de musique téléchargeable. Un modèle qui, somme toute, n'est pas sans rappeler celui de Mailorama.

L'utilisation qui sera faite des données personnelles n'est pas expliquée et les CGU - qui n'ont pas encore été rédigées ou mises en ligne - ne répondent pas à cette question que l'internaute sera certainement amené à se poser.

Nous noterons deux choses : d'abord l'absence d'opt-in partenaires, mention obligatoire si les données devaient être cédées à des tiers. Et le fait que l'âge n'est pas demandé ou obligatoire : les moins de 18 ans ne seront donc pas refoulés à l'entrée, le site voulant sans doute s'ouvrir à un public le plus large possible (c'est pourtant une donnée de ciblage essentielle).

On suppose donc, un peu à la manière d'un Guvera et ses channels de marques, qu'il faudra attendre d'avoir à disposition de nouveaux questionnaires de sponsors à remplir afin de télécharger ses titres désirés. Et que ces questionnaires (ou offres d'achat) seront poussés par e-mail en fonction du profil que le membre aura bien voulu se créer en remplissant les questionnaires thématiques.

Une partie musicale apportée par des partenaires

Le développement d'une offre de téléchargement musical est à la fois long et très couteux. Ce sont les principales raisons qui expliquent pourquoi aujourd'hui, sur le marché français, il ne se lance pratiquement aucun nouveau site de téléchargement de musique. Seul le streaming en mode smartradio (c'est-à-dire dépendant d'une tarification « radio » fixée par la SACEM) attire encore de nouveaux arrivants, comme Yasound.

Faute de levée de fonds (aucune annonce n'a été faite en ce sens), les fondateurs de ZeroThune ont donc dû se passer des traditionnels accords avec les maisons de disque et la SACEM, l'implémentation d'un back office, d'outils de reporting, etc. Accords qu'il aurait été difficile pour ne pas dire impossible à obtenir tant le « gratuit » rebute aujourd'hui les Majors. Mais ce qui signifie que vous ne pourrez pas être diffusé directement sur ZeroThune en tant qu'artiste.

7digital

Mais ZeroThune est avant tout un site dédié à la musique (qui veut être à cet art ce que Wikipédia est à l'encyclopédie, selon la page Qui sommes-nous).

Capture d'écran ZeroThune - copyright 2012 Urban Musique

Cet aspect a été confié à deux partenaires avec tout d'abord 7digital pour le catalogue musical (qui apporte 10 millions de titres téléchargeables à ZeroThune quand il en annonce 15 millions sur son propre site). Le partenariat avec Amazon et ses 17 millions de morceaux, pourtant publiquement annoncé en juillet 2010, n'a donc pas été maintenu. C'est tout de même près du double de ce que propose Beezik.

Le téléchargement n'étant pas activé, il est encore impossible d'en décrire le processus côté partenaire. L'écoute 60' (une durée plutôt inhabituelle) est par contre accessible sur certains albums.

Aucun détail n'est donné sur la qualité audio des fichiers proposés. A titre d'information, 7digital propose plusieurs formats qui vont du MP3 encodés en CBR 320 Kbps jusqu'au Flac (donc lossless). Est-ce ce format qui sera disponible sur ZeroThune ? Le cartel indique pour l'instant du 256 Kbps, c'est-à-dire exactement celui d'Amazon.

Music Story

La partie contenu, souvent le parent pauvre des sites dédiés à la vente de musique numérique, est ici fournie par la société Music Story. Les artistes, discographies, biographies, notes et critiques sont ainsi poussées par cette solution bâtie sur le modèle de l'américain AllMusic (pour faire simple).

Une interrogation subsiste : les membres de ZeroThune pourront-ils participer à l'élaboration du contenu musical, comme semble le suggérer le texte de présentation du projet ?

Il sera intéressant de voir comment Google gérera le duplicate content étant donné le nombre de sites qui déploient rigoureusement le même contenu issus des bases de Music Story (dont le leur).

De la musique gratuite... qu'il est aussi possible d'acheter

La véritable nouveauté de cette version est l'apparition d'un processus d'achat de packs de thunes de différents montants payables par carte bleue ou même PayPal (selon le site). Phase de rodage oblige, les montants indiqués sur des jetons de casino ne correspondent pas toujours avec la valeur du pack.

Les différents packs de musique - copyright Urban Musique

Les montants de ces packs sont plutôt étranges et doivent certainement être fantaisistes à l'heure actuelle (532 thunes, 734, 1254, etc.) car une fois convertis en euros et donc en musique téléchargeable, ils semblent peu intéressants pour l'internaute.

Ils laissent cependant supposer que les thunes pourraient se gagner à l'unité.

Un modèle déjà pratiqué

Le modèle du téléchargement de musique gratuite financé par la publicité n'en est pas à son premier coup d'essai. A l'international, on rappellera seulement l'expérience malheureuse de SpiralFrog.

Sur le marché français, le seul à avoir tiré son épingle du jeu est Beezik grâce à la formule du « spot vidéo garanti ». Son récent rachat par Ebuzzing n'a fait que confirmer le succès de ce format publicitaire.

D'autres ont misé sur des formats plus traditionnels ou sur la qualification de fichiers, comme Airtist, sans pour autant réussir à atteindre l'équilibre, le marché publicitaire étant généralement jugé trop modeste pour faire vivre de telles initiatives.

En se référant à l'ARPU d'un site à succès comme Facebook dont le modèle est aussi la publicité ciblée, on a du mal à imaginer qu'il puisse être possible de télécharger plus d'une dizaine de titres par an dans le meilleur des cas sur un site comme ZeroThune. C'est pourtant tout le mal que je souhaite à ce projet.

Enfin, la société est à la recherche d'un nouveau développeur PHP/MySQL afin de poursuivre le travail réalisé jusqu'ici.

Mise à jour à 16h : contre toute attente, le site a finalement fermé ses portes peu avant 16h aujourd'hui. Aucune date de lancement n'est annoncée sur la nouvelle page temporaire de ZeroThune.

Il faudra sans doute attendre l'arrivée de sponsors en nombre suffisant avant de pouvoir s'inscrire et profiter du téléchargement gratuit comme l'annonçait cette mise en ligne précoce.

Mise à jour à 18h30 : le site est à nouveau disponible ! ça n'aura duré que quelques minutes.