De la vente aux enchères aux « bons plans »
Il y eu tout d'abord l'engouement pour la vente aux enchères à la fin des années 90 : sur le sol français, on ne comptait plus les projets (Eurobid, iBazar, Aucland, Ontatoo, Evatek bien sûr ;-) ) dont il ne reste aujourd'hui pratiquement rien, hors eBay.
Juste derrière ce phénomène, la très fulgurante bulle de l'achat groupé emportée par Clust.com, qui n'est bien sûr pas sans rappeler le modèle Groupon.
Suivirent les shop-bots (dont Le Négociateur créé par mes camarades et amis de l'IIM) ou comparateurs de prix qui se comptaient alors eux aussi par dizaine. Modèle plus pertinent et essentiel face à la profusion d'offres et de produits, le modèle perdure à travers de nombreux représentants.
Plus tard, et pour une fois venue de France, la mode de la « vente privée » a littéralement explosé et les clones du modèle original vente-privee.com ont fait leur apparition en masse, là encore avec plus ou moins de bonheur (voir par exemple ces billets sur 24heures.fr ou encore Wantuno).
Tous ces modèles originaux ont connu la même évolution : d'abord l'émergence d'un précurseur, souvent Nord-américain, suivie d'une éruption de concurrents (plus problématique au début des années 2000 où un site devait sortir de ses frontières pour réussir et atteindre une certaine masse critique) directs ou sectoriels (niches). Ensuite l'écrémage et la contraction du marché autour d'une poignée d'acteurs, voire d'un seul, et parfois la disparition quasi-totale du concept (comme l'achat groupé ou le troc) suite à l'écroulement de la demande (la demande est souvent artificielle : stimulée par un « effet de mode », le bouche-à-oreille, des tarifs excessivement bradés, un marketing agressif, etc.).
La folie du modèle Groupon
Vous me voyez certainement venir avec cette longue introduction : j'ai le sentiment que nous sommes de nouveau au pic du développement de la vente de coupons de réduction selon Groupon. Et « pic » est un euphémisme quand on regarde de plus près ce marché.
Le lancement de LivingSocial en France (ou plus exactement à Paris) il y a quelques jours n'est que le dernier épisode d'une longue mais jeune saga (Groupon n'a que deux ans d'existence).
On ne compte donc plus le nombre de copycat du modèle original et ceux qui en vivent comme les agrégateurs. Nous y retrouvons d'ailleurs 3 Big Four : Google, Facebook et Amazon.
Mais amusons-nous à en dresser une liste - que j'espère exhaustive - pour le seul marché français. :-)
- Groupon (ex-CityDeal)
- Google Offers (à venir en France)
- LivingSocial (financé par Amazon)
- Facebook Places (à venir en France)
- Rosedeal by vente-privee.com
- kgbdeals
- LeTrader
- bon-prive.com
- Everybodeal
- Groupolitan
- Dealissime (société dans laquelle LivingSocial a pris une participation)
- ClubDeal
- Lookingo
- Dealgroop
- Skoopon
- Wonderdeal
- Waah!
- Vis Ma Ville
- Envies en ville
- Deal For Men
- DealPourTous
- Carré des deals
- Wonderboxprivé
- iDeal (de iGraal, un spécialiste du cash back)
- MaxiDeal
- Offerum
- AutomoDeal (dédié à l'automobile)
- SherifDeal
- BuyPacker
- Restauprivé (spécialisé dans la restauration, absorbé par Restopolitan)
A cela il faut ajouter les agrégateurs de deals.
Comment expliquer cet engouement ?
Plusieurs facteurs ont fait du « modèle » Groupon un candidat idéal à la copie :
- L'absence de barrières technologiques à l'entrée : la mise en place d'un tel service est extrêmement simple d'un point de vue technique.
- Un abondant vivier de petits commerces, qui plus est trop souvent délaissés par les acteurs du e-commerce.
- L'extraordinaire croissance de Groupon qui fait des envieux (pour ne pas dire aveugle) ; sa « valorisation » aussi (20 milliards de dollars).
- Les limites conceptuelles du modèle (1 ou 2 deals par jour et par ville) qui offrent des espaces à la concurrence.
En ce qui me concerne, je doute de la viabilité du modèle. D'une part, on ne fidélise pas un client en bradant ses services à 50% ou plus. Les amateurs de deals auront plutôt tendance à courir la bonne affaire plutôt que de revenir chez un commerçant.
Et les commerçants eux-mêmes finiront par s'en lasser. Outre la grogne de ces derniers vis-à-vis des conditions imposées par le leader du marché ou de résultats parfois décevants, il suffit de voir leur attitude face à un modèle similaire (et quelque part précurseur de la folie Groupon) déjà bien implanté : Smartbox.
Les « clients Smartbox » sont généralement considérés comme des clients de seconde zone. Les prestations sont souvent vite expédiées afin de limiter les pertes de chiffre d'affaires. Et il en va de même pour Groupon et ses clones...
Moralité ? Il n'y a pas de « miracle Internet » : tout se paye, aussi bien un service que l'acquisition de clients.
1 De Guillaume -
Et bien Facebook Place est mort avant même d'arriver sur nos terres ! Et le burn rate de Groupon semble inquiéter de plus en plus d'analystes, qui se demandent même si la société tiendra le cap jusqu'à son introduction en bourse. A suivre, donc !